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1 mai 2014

Usage du langage

Permettez l'à-peu-près, certaines lettres sont plus difficiles à "fournir" que d'autres. (Je n'ai pas encore pensé au W, X, Y, Z !)

L'idée de cet article m'est venue à la suite d'une question posée sur un groupe de Facebook : "- Parlez-vous tout seul ?" S'ensuivit un petit débat entre Asperger et neurotypiques, ces derniers affirmant que cette pratique, courante, était loin d'être une caractéristique Asperger.

En effet, qui n'a jamais laissé déborder ses ressentis par une expression orale ? J'ai tendance à croire, pourtant, que nos difficultés à communiquer nous poussent à avoir une utilisation du langage différente. Moi, par exemple, qui ai du mal à parler aux gens, le fait énormément à ma chatte. Petite illustration : Un jour que nous revenions de courses, elle nous accueille à la porte, comme d'habitude. J'improvise un petit air qui accompagne des paroles disant ma joie de la revoir. "-Tiens, me fait gaiement remarquer ma colocataire, elle, elle a droit à une chanson !". Cette dernière n'ayant généralement, en retour à ses salutations, qu'un "- ça va" suffisamment atone pour vouloir dire qu'effectivement, ça va bien ou qu'au contraire, bof, ça ne va pas tant que ça.

Mon fils peut raconter longuement et en détails un film qu'il a vu mais demandez-lui ce qu'il a fait de sa journée, ce qu'il compte faire de ses vacances ou comment ça se passe à l'école : il n'y a plus personne. Petit, il était frappé d'un mutisme sélectif. Un jour que je venais le chercher à la halte-garderie, il était si impressionné par la chute d'une petite fille dans les escaliers qu'il n'a pas pu attendre pour me le raconter. Stupéfaction du personnel : "- Mais... Il sait parler !". Cela faisait plus d'un an qu'ils le gardaient. Une de mes tantes me rendait visite. Il prononça distinctement "télécommande" en lui présentant l'objet. "- Ben dis donc, toi qu'on n'entend jamais, tu sais dire un long mot comme ça ! Tu m'épates !". Quand nous rencontrions un de ses camarades de maternelle l'interpellant gentiment, jamais il ne répondait. J'avais beau le gronder, lui expliquer qu'il fallait dire bonjour. Peine perdue, il n'ouvrait pas plus la bouche la fois suivante. A la maison, il me "saoulait" de paroles et, bien souvent, je lui demandais de se taire. Je ne me rendais pas compte que son besoin de communication ne pouvait s'exprimer qu'avec moi.

Mon (futur) gendre m'a raconté qu'il avait été intrigué de constater que mon fils, qui ne répond que contraint et forcé en société, pouvait discourir avec un objet en tournant autour.

Mon fils et moi parlons tout seuls. Cela s'est calmé depuis l'arrivée de E dans notre appartement. Mais avant, nous nous croisions souvent en marmonnant. "- Qu'est-ce que tu dis ?" "- Rien, rien, je me parle". Cinq minutes plus tard c'était au tour de l'autre !

Pour moi, au travail, c'est encore plus flagrant depuis ma mutation (ou bien les commentaires de mes nouveaux collègues m'en ont-ils fait prendre davantage conscience ?). "- Suis bien obligée de me parler toute seule puisque personne ne m'écoute ici.", "- Vous êtes jeunes, vous. Vous verrez quand vous aurez mon âge !" et autres justifications humoristiques de ce genre font très bien accepter ce travers.

Dans la rue, quand je croise les regards effarés de certains passants, je lance un "merde !" bien retentissant. (Tout le monde peut comprendre qu'un problème puisse obnubiler au point de s'oublier). Cela rassure. Les regards se détournent.

Mes partenaires successifs, lors de mes "absences" m'ont souvent posé la question : "- A quoi penses-tu ?". "- A rien." est mon invariable réponse. Je ne peux ni ne veux leur expliquer le cours de mes réflexions. A côté de cela, ils subissent mes monologues et mes appartés qui ne correspondent à rien.

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